COMPTES RENDUS

Michel BAUD, Famille royale et pouvoir sous l’Ancien Empire égyptien, BdE 126, Le Caire 1999.

Ecrit par un ancien membre de l’Institut français d’archéologie orientale du Caire, cette étude est une version révisée de la thèse de doctorat soutenue par l’auteur en 1994 à l’université de Paris IV - Sorbonne.

Le but de ce travail est de mieux définir le rôle joué par la famille royale dans la monarchie égyptienne et ses institutions à l’Ancien Empire. L’ouvrage illustre donc de façon exemplaire l’intérêt de l’étude diachronique des cadres du pouvoir en relation avec le domaine de la parenté.

L’objet de cet écrit est fondé par l’intermédiaire d’un corpus d’environ 300 fiches portant sur des fonctionnaires de cette époque. L’analyse poussée de leurs titres et de leurs liens de parenté a permis ainsi de recueillir une masse d’informations en rapport avec la problématique soulignée, tant au niveau de la datation qu’au niveau de l’état de la documentation mise en relief.

L’étude a débuté par une révision critique des méthode traditionnelles de datation des monuments et des personnages employés dans le corpus. L’auteur tente alors de faire le point sur les débats entourant la date des ensembles de tombes occupés par la famille royale à Gîza et à Dahchour. En utilisant le plus souvent les critères de datation mis de l’avant par N. Cherpion, l’auteur arrive à quelques conclusions. Les mastabas de Gîza se sont implantés en deux vagues successives : la première étant survenue sous les règnes de Khoufou jusqu’au début de celui de Rêkhaef, et la deuxième de Rêkhaef jusqu’au règne de Menkaourê. Pour ce qui est du site de Dahchour, les monuments rencontrés montrent une fourchette de date allant de Snéfrou jusqu’au début de la Ve dynastie.

Après avoir dressé ce constat, M. Baud entreprend d’examiner les différents groupes familiaux, par l’analyse des catégories de titre de parenté. Il en arrive ainsi à distinguer trois niveaux de parenté royale. Le premier concerne les titres sans terme de parenté. L’auteur affirme qu’ils sont la marque d’une présence à la cour royale, comme c’est d’ailleurs le cas des titres rx nswt et Xkrt nswt. Le deuxième niveau regroupe les titres à termes de parenté qui ne sont pas associés à nswt. Ces titres dénotent l’importance de la descendance dans le culte funéraire. Il s’agit ici surtout de titres contenant la racine nTr, comme it-nTr. Enfin, un troisième niveau est identifié, qui rassemble les titres de parenté étroite associés à nswt. L’auteur rend ainsi compte de la possibilité que certains titres soient fictifs, grâce entre autre au titre sA-nswt ou sAt-nswt. La parenté royale est donc mise en lumière d’une manière très précise.

Nous trouvons en dernier lieu une analyse portant sur le statut et les fonctions des groupes familiaux précédemment observés par l’auteur. Les différents liens existant entre ces groupes et le pouvoir en place sont alors examinés. On apprend ainsi quels sont les marques visibles du statut dans les représentations funéraires des fonctionnaires, comme les sceptres, les vêtements, etc. De plus, l’auteur consacre une partie entière à l’évaluation de l’importance des fils royaux dans la société politique par l’entremise des titres rencontrés dans le corpus et qui sont en relation avec sA-nswt. Par la suite, l’accent est plutôt porté sur le rôle des femmes de la famille royale au sein de l’administration. On découvre alors que les reines ont un statut politique assez variable selon les règnes et que les « filles royales » sont amenées à jouer un rôle important dans la politique matrimoniale de la monarchie.

De cette analyse, l’auteur tire trois lignes de forces essentielles des relations existant entre la parenté, le pouvoir et la monarchie. Premièrement, la parenté, qui fournit un modèle aux relations de pouvoir, imprègne l’idéologie monarchique, car c’est elle qui confère la légitimité politique au roi. Deuxièmement, le roi, en plus d’être un père pour sa vraie famille, est un père pour tous ceux qui portent un titre de parenté royale. Enfin, le roi est aussi un « sur-père » pour la population toute entière, par le fait qu’il soit au sommet de la société. Dans l’ensemble, M. Baud a su parfaitement tiré profit de la problématique qu’il s’était donnée au départ en réalisant un travail très global et dont la maturité profite à tous les lecteurs.

Cédric Gobeil, 2000

Voir aussi la page de l'éditeur : http://www.ifao.egnet.net/doc/Publications/NouvPubMonog.htm

14/12/00
© Renaud de Spens, 2000